vendredi 1 août 2008

La parole du jour, Confessions, vendredi 1er août 2008

Confessez-vous donc vos péchés les uns aux autres et priez les uns pour les autres, afin d'être guéris. La requête d'un juste agit avec beaucoup de force. (Jc 5,16)

***

Cher Père Angers,

Vous rappelez-vous de moi? J’étais ce jeune homme qui venait tout juste de renouer avec sa foi. J’étais idéaliste, rempli d’espoir, je poursuivais avec passion la connaissance philosophique et je croyais avoir le cœur d’un homme prêt à gravir les plus hauts sommets. Je voulais sincèrement m’impliquer dans ma paroisse. Je désirais me donner bénévolement à la Sainte Église catholique (Sainte puisque sa mission est sainte). Je cherchais tant de réponse à mes questions; je cherchais tant à étancher ma soif de vivre…et je me suis soudainement imaginé tant de déceptions.

Vous donc, écoutez la parabole du semeur. Quand l'homme entend la parole du Royaume et ne comprend pas, c'est que le Malin vient et s'empare de ce qui a été semé dans son coeur; tel est celui qui a été ensemencé au bord du chemin. Celui qui a été ensemencé en des endroits pierreux, c'est celui qui, entendant la Parole, la reçoit aussitôt avec joie; mais il n'a pas en lui de racine, il est l'homme d'un moment: dès que vient la détresse ou la persécution à cause de la Parole, il tombe. Celui qui a été ensemencé dans les épines, c'est celui qui entend la Parole, mais le souci du monde et la séduction des richesses étouffent la Parole, et il reste sans fruit.
(Mt 13,18-22)

J’avais 24 ans, j’avais l’illusion de terminer ma maîtrise à l’Université Laval; ne restait que mon mémoire à rédiger. Je menais des recherches bibliques en parallèle; les capucins et les prêtres de Limoilou, dont vous, me communiquaient ce qu’ils savaient. «Toutefois, j’avais beau entendre, je ne comprenais pas». (Es 6,9) Vous aviez beau m’expliquer les choses de l’Église, vous aviez beau m’exhorter à persévérer, vous aviez beau me donner des responsabilités dans la paroisse, je m’enfermais de plus bel dans mon orgueil et je me formais l’idée de connaître mieux l’Église que les théologiens et les ecclésiastes eux-mêmes. Et vous voir avec de l’argent, des voitures et des appartements convenables m’exaspérait. En réalité, j’étais plein de jalousie et j’étais très prompt à vous condamner.

Chacun est tenté par sa propre convoitise, qui l'entraîne et le séduit. (Jc 1,14)

Ne vous posez pas en juge, afin de n'être pas jugés; car c'est de la façon dont vous jugez qu'on vous jugera, et c'est la mesure dont vous vous servez qui servira de mesure pour vous. (Mt 7,1-2)

J’avais 24 ans. Mon tempérament de fêtard m’apporta dans une spirale infernale: ma moyenne universitaire se mit à chuter et mon niveau d’endettement se mit à grimper dangereusement. Les portes du savoir officiel de l’université se sont brusquement fermées devant mon enthousiasme estudiantin. Je mis la faute sur Dieu (qu’Il me pardonne pour tant d’ingratitude), me disant que c’était Lui qui m’avait laissé me perdre dans les beuveries et l’école buissonnière. J’avais alors un prétexte pour vous rejeter et pour justifier ma propre détresse. En conséquence, je mis un terme à notre relation et je me repliai sur moi-même.

Dans l'épreuve de la tentation, que personne ne dise: «Ma tentation vient de Dieu.» Dieu en effet ne peut être tenté de faire le mal, et lui-même ne tente personne. (Jc 1,13)

J’avais 24 ans. J’habitais un modeste 4½. J’étais sans le sou. Je ne voyais aucun avenir pour moi. C’était toujours la nuit.

Ais-je fais une dépression? Pendant 3 mois, j’ai joué à des jeux vidéo et à des jeux de plateau pour oublier ma situation. Mon épouse, d’une patience et d’un amour remarquable, me laissa cuver mon désespoir: elle savait que je finirais par rebondir.

Un matin, comme par enchantement, je dis à ma femme: «Femme, je vais acheter une voiture, je serai livreur et je vais renverser la situation.» Avec l’énergie du désespoir, malgré le refus de mon père et des banques de m’endosser, j’achetai une voiture et je me mis à livrer pour différents restaurants et pour de multiples petites entreprises de messagerie. À force d’audace et de persévérance dans le milieu du transport, j’accédai, avec mon expérience acquise, à un emploi stable dans l’une des plus grosses multinationales, avec un salaire plus que décent. Mon épouse et moi fîmes l’acquisition d’une maison à Vanier. Nos carrières respectives prirent leur envol.

J’avais désormais 28 ans. J’étais riche, j’avais réussi mais quelque chose ne tournait pas rond: je me sentais vide. J’avançais, j’avais une vie sociale, les loisirs ne manquait pas «mais mon âme était triste à en mourir». (Mt 26,38) J’essayai tant bien que mal de me remettre à la philosophie mais c’était peine perdue: un mal pernicieux me rongeait de l’intérieur. J’avais l’impression d’être le spectateur de ma vie et de dormir tout en étant éveillé.

…et tout ce qui apparaît ainsi devient lumière. C'est pourquoi l'on chante: Réveille-toi, ô toi qui dors, relève-toi d'entre les morts, et le Christ t'illuminera.
(Ep 5,14)

Je décidai alors de lire la Bible en son entier. J’avais, à de maintes reprises, lu des passages mais jamais en son entier. Je me dis: «Peut-être trouverai-je la lumière pour éclairer mes ténèbres. Sinon, je pourrai me targuer d’avoir lu la Bible en son entier». À mon grand étonnement, j’ai découvert Dieu comme il est: plein de patience et de tolérance (surtout durant la période des rois), d’amour et de miséricorde (surtout dans l’Exode et le livre de Job). J’ai découvert également que tout l’Ancien Testament annonce le Nouveau Testament (surtout chez Ésaïe, Moïse, Jérémie, Ézéchiel, Élie, David et j’en passe). Et ma lecture des textes du Nouveau Testament m’a transformé (on ne peut rester indifférent surtout en lisant l’Évangile de Saint Jean, l’Évangile du bien-aimé, l’Évangile du Bon Berger, de la Vraie Vigne, de l’Agneau de Dieu; et aussi à la lecture des Épîtres de Pierre, Jacques et Paul, qui sont, selon moi, la base du christianisme). Il n’y a rien dans ces écrits qui étouffent la dignité de l’être humain. Au contraire, c’est à leurs lectures qu’on acquiert cette dignité tant recherchée.

J’avais 28 ans, j’étais comblé, je retrouvais ma foi perdue mais je doutais toujours du rôle de l’Église.

Devant mon intérêt pour les sujets spirituels (puisque je lisais aussi, entre autres, le Livre des morts tibétains, le Coran et les écrits des grands initiés), le nouveau conjoint de ma sœur, Daniel Bureau, me proposa de lire une biographie de Saint François d’Assise. C’est là que j’ai eu ma transformation intérieure. Lui qui avait tant de griefs envers l’Église, lui qui avait accompagné les croisés et constaté leur fureur sanguinaire, lui qui avait vu tant d’injustice, il n’abandonna jamais l’Église: il lui resta toujours fidèle. Mieux, il s’en servi comme tremplin pour construire son ordre des franciscains.

Touché par son exemple, je décidai de m’investir à mon tour dans mon Église. D’abord, en retournant à la Sainte messe dominicale. Ensuite, en donnant de mon temps en tant qu’enseignant de catéchèse symbolique. Pour finir, j’ai trouvé dans la pratique quotidienne du mystère eucharistique les forces qu’il me fallait pour avancer jour après jour dans ce monde trouble et effrayant. Le produit de ce cheminement fut ce blog, mêlant réflexions sur les connaissances christologiques et élucubrations d’un néo-christianisme œcuménique basé sur l’Église catholique renouvelée.

Voici ce que je reconnais: je suis au service du Dieu de nos pères selon la Voie qu'eux qualifient de secte; je crois tout ce qui est écrit dans la Loi et les prophètes. (Ac 24,13)

Aujourd’hui j’ai 31 ans. Je n’ai qu’une envie, c’est servir le Christ et écouter sa parole afin qu’elle pénètre le plus profond de mon être. Je me suis lié d’amitié avec les chrétiens de ma paroisse mais j’aimerais aussi bâtir des ponts avec les diocésains des autres paroisses de la Ville de Québec. Je pense, entre autres, à l’abbé Pierre Gingras en Haute-Ville et à mon nouvel ami de Sillery, le prêtre Bertrand Quirion.

Mais par-dessus tout, je vous demande sincèrement pardon pour tout le mal (éventuel) que j’aurais pu vous causer. Je cherche encore à savoir comment le malin a pu s’immiscer dans mon esprit devant un homme qui m’avait totalement ouvert son cœur.

  • Je me souviens d’un géant plus vrai que nature qui m’inspirait joie et confiance.
  • Je me souviens que vous m’avez racontés vos années de missionnaire en Afrique.
  • Je me souviens que vous étiez heureux d’avoir sauvé l’orgue de St-Fidèle.
  • Je me souviens que vous m’aviez mis en garde des profiteurs de l’Église.
  • Je me souviens que vous m’aviez demandé d’être sérieux et constant dans ma démarche.
  • Et bien maintenant, j’y suis.

Excusez-moi de tout mon cœur. Je confesse à Dieu que je vous ai lâchement laissé tomber (un peu comme Saint Pierre mais plus comme Juda). Je reconnais devant vous que je vous ai manqué le plus élémentaire des respects. C’est pourquoi je vous supplie, Père Angers, de prier pour moi Jésus-Christ, la Sainte Vierge Marie, les Saints et tous les anges pour qu’ils me soutiennent dans ma foi renouvelée.

Si vous ne voulez pas me faire miséricorde, alors je comprendrai; ce serait de bonne guerre, j’aurai bien mérité ce que j’aurai semé. Permettez-moi seulement de publier cette lettre sur mon blog afin de faire réfléchir tous ceux qui auraient le malheur de vouloir commettre ce que j’ai commis.

En attendant, et pour le reste de ma vie, je prierai pour vous notre Seigneur et notre Dieu. Pour qu’Il vous donne longévité, force et santé. Pour qu’Il vous permette de voir et de contempler sa Gloire dans toute sa splendeur. Pour qu’Il nous donne la paix à tous les deux, et à tous les amis de Dieu.

…moi qui étais auparavant blasphémateur, persécuteur et violent. Mais il m'a été fait miséricorde, parce que j'ai agi par ignorance, n'ayant pas la foi. (1Tm 1,13)

Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation. (2Co 1,3)

Votre (désormais et à tout jamais) dévoué serviteur

François Langlois

Aucun commentaire: